Séminaire Dyneco d'Aline Gangnery Mercredi 31 octobre à 11 h dans la salle de réunion Dyneco
Occupant une place de premier ordre dans nos paysages côtiers, l’ostréiculture est le premier contributeur de la filière aquacole française avec une production estimée à 85000 tonnes ces dernières années. Véritable espèce ingénieur, l’huître creuse Crassostrea gigas, après son introduction dans la fin des années 1960, s’est aussi progressivement et naturellement installée dans de nombreux écosystèmes côtiers de la façade atlantique et de la manche occidentale. Elle y joue désormais aussi un rôle essentiel sur le plan écologique en y rendant différents services écosystémiques. Invertébré suspensivore, l'huître creuse se nourrit principalement de phytoplancton, sans qu'on sache réellement l'effet de la composition floristique des cortèges phytoplanctoniques sur sa croissance en milieu naturel.
Dans ce contexte, l'objectif de notre travail a été d’identifier les taxons phytoplanctoniques susceptibles d’influencer positivement ou négativement la croissance de l’huître creuse, Crassostrea gigas, à partir d’un jeu de données unique regroupant presque 10 ans de suivis réalisés sur les côtes françaises depuis 2008.
Plus précisément, des données biométriques de croissance d’huîtres, issues des réseaux RESCO-VELYGER, et des données d’abondances phytoplanctoniques, principalement issues du réseau REPHY, ont été analysées conjointement par le biais d’outils statistiques. Les données concernent 5 écosystèmes (Rade de Brest, Baie de Vilaine, Baie de Bourgneuf, Pertuis Charentais et Bassin d’Arcachon) et 9 années (2009-2017). Focalisant dans un premier temps sur la période printanière/estivale, les résultats montrent que la croissance repose en grande partie sur le genre Skeletonema, qui constitue un taxon clé. Le genre Cerataulina est également associé à des croissances plus élevées, contrairement aux Leptocylindraceae, Gymnodiniaceae et espèces du genre Alexandrium. Les espèces du genre Chaetoceros ont un rôle tout à fait particulier puisqu’au-dessus d’une certaine abondance, elles sont associées à des croissances plus faibles.
Ce premier travail, unique à notre connaissance, montre le rôle essentiel ou néfaste de certaines espèces de phytoplancton dans la croissance de l'huître et pose la question des modifications potentiellement majeures que pourraient engendrer la raréfaction de certaines espèces ou leur modification phénologique dans le contexte actuel du changement climatique et de l'effritement de la biodiversité.